Amaury Pierron : “Me livrer pour mon film m’a permis d’ouvrir les yeux sur certaines choses”



À l’occasion de la sortie de son film « The Pilot » qui revient sur sa renaissance en 2022, Amaury Pierron (vainqueur de la Coupe du Monde et vice-champion du monde), s’est confié à The Rider Post. 

D’où vient l’idée de faire ce film ? 

J’ai toujours été attiré par les documentaires sur les sportifs, c’est quelque chose que j’adore regarder. Il n’y en a pas énormément dans nos sports, je trouvais ca dommage. Depuis longtemps, je gardais en tête l’idée de faire une vidéo qui retrace ma carrière mais je n’osais pas demander. Alors quand cette année, une boite de prod indépendante qui nous suivait pour du contenu sur les réseaux, m’a proposé ce projet, j’étais grave chaud !

Quel message principal vouliez-vous faire passer à travers ce film ? 

Personnellement, j’ai toujours cru en mes rêves et je me suis toujours dit que c’est possible de les réaliser. Dans le documentaire, je pense que ça ressort bien, malgré les hauts et les bas. En tant que sportif de haut niveau, tu dédies toute ta vie à ton sport. Le sport peut t’offrir autant qu’il peut te détruire. Il faut croire en ses rêves, ne jamais abandonner.

Tu as d’ailleurs vécu des périodes assez noires avec les nombreuses blessures. Se replonger dans ces souvenirs pour le film a-t-il été douloureux ? 

Au contraire, me livrer m’a permis d’ouvrir les yeux sur certaines choses. Pendant les interviews, tu te rends compte qu’il y a des proches qui sont toujours là et qui l’ont toujours été, même dans les pires moments. Ce sont grâce à ces personnes là que tu t’en sors. Quand tu vis ta vie, tu ne te rends pas compte de certaines choses. En en parlant, j’ai compris toutes ces choses. 

Photo Commencal ©Johny Cook

Avec le recul, c’est plus dur de devenir champion ou de le rester ? 

Le rester, à 100% ! Quand tu deviens champion pour la première fois, personne ne t’attend. Quand je gagne la Coupe du Monde 2018, je débarque de nulle part. Tout fonctionne comme sur des roulettes, j’avais zéro pression. Chaque victoire, c’était du bonus, tout était génial. Une fois que t’es champion, tout le monde attend de toi que tu le refasses. Beaucoup de gens veulent faire des vidéos avec toi, des shootings photo et les médias te mettent en avant. Avec les sponsors, tu gagnes plus d’argent donc tu sens le besoin de rendre tout ce qu’on te donne. La pression est énorme. Tu as simplement moins le temps de te focalier sur toi-même, c’est ça qui rend la chose bien plus difficile.

Tu es tenant du titre de la Coupe du Monde, qu’attends-tu de la saison 2023 ? 

J’ai eu beaucoup de pépins physiques cet hiver, Je ne me suis pas entraîné comme je voulais. J’ai aussi eu beaucoup de sollicitations médiatiques en tout genre. Pour être honnête, je ne m’attends pas à un début de saison flambant. Cette année, mon objectif principal, ce sont les championnats du monde (ndlr : du 2 au 13 août 2023 à Glasgow (Écosse)). La Coupe du Monde passera ensuite. 

Photo Commencal ©Johny Cook

Les disciplines du VTT sont de plus en plus médiatisées. Quel regard as-tu sur cette popularité grandissante ? 

Dans les dernières années, c’est vrai que ça a bien évolué. Quand j’ai débuté, personne ne savait ce qu’était le VTT de descente. Quand on a commencé à être diffusés, ça a fait du bien à la discipline. Les gens autour de moi savaient enfin ce que je faisais et pouvaient y avoir accès facilement. Maintenant, la diffusion a été reprise par un autre groupe (ndlr : Discovery Sports a récupéré les droits aux dépens de Red Bull), ça va peut-être encore ouvrir la visibilité de notre sport à d’autres personnes.  

En ce moment, plusieurs diffuseurs sont critiqués pour transformer le sport en show, comme c’est le cas en Formule 1. Penses-tu que cela puisse arriver en VTT ? 

En fait, c’est déjà plus ou moins le cas. Pour que ce soit plus télévisuel, on nous fait rouler sur des pistes toujours plus rapides et plus dangereuses. Pour faciliter la prise d’images, le diffuseur veut également réduire la durée des pistes en dessous de trois minutes. S’il n’y a plus de longues pistes, ce sera toujours le même type d’efforts et ça risque de réduire la diversité des riders. Il y aura des petits changements comme ça mais je ne pense pas qu’on puisse dénaturer notre sport.

Loïc Bruni, Loris Vergier, Myriam Nicole, toi, … Est-ce que tu as l’impression d’être dans une génération dorée ? 

Franchement, on a une génération incroyable. Les années d’avant, la France était moins bien cotée. On avait une réputation de gars qui n’étaient là que pour bosser, pas forcément pour mettre l’ambiance. Grâce à Loïc (Bruni), notre génération a évolué. Certes, on est des très gros bosseurs mais on est souriants et on s’entend bien avec tout le monde. La France gagne beaucoup ces dernières années. Moi, je suis très fier de faire partie de cette merveilleuse génération. 

La réussite s’étend même au cross-country. Quels sont les secrets de l’école de VTT française ? 

C’est peut être une histoire de génération mais il y a des réels efforts dans le suivi des jeunes. À l’époque où je débutais, je n’avais pas forcément un gros niveau mais j’ai rapidement eu l’opportunité de faire des stages avec les équipes de France. Je roulais avec les élites et j’avais des étoiles dans les yeux. Tu passes une semaine avec eux, tu vois comment ils travaillent, … Et quand tu es jeune, ça motive à fond. Ca te fait rêver. Tu comprends qu’un athlète c’est un humain comme les autres et que tu en es capable aussi. Encore aujourd’hui, on a des jeunes derrière qui arrivent et qui roulent très fort. Ça fait plaisir à voir et ça nous pousse à devenir meilleurs.

Photo Commencal ©Johny Cook

Retrouvez les plus gros tricks de l’histoire du VTT dans ce reportage de Riding Zone (émission produite par Puzzle Media).